Burn-out chez les chirurgiens-dentistes : Symptômes, causes… On vous en parle ici

Qu’est-ce que le burn-out ?

Le syndrome d’épuisement professionnel, équivalent en français du terme anglais burn-out, se traduit par un « épuisement physique, émotionnel et mental qui résulte d’un investissement prolongé dans des situations de travail exigeantes sur le plan émotionnel ». Les travaux de Christina Maslach ont permis de concevoir le syndrome d’épuisement professionnel comme un processus de dégradation du rapport subjectif au travail à travers trois dimensions : l’épuisement émotionnel, le cynisme vis-à-vis du travail ou dépersonnalisation (déshumanisation, indifférence), la diminution de l’accomplissement personnel au travail ou réduction de l’efficacité professionnelle.

Il touche tous les métiers mais a initialement été observé chez les soignants dans les années 70. On a longtemps parlé d’un syndrome des professions d’aide, et aujourd’hui, 50% des professionnels de santé se sentent concernés par le burn-out.

Particularités des soignants

Population à risque historiquement identifiée et objet de nombreuses études récentes montrant une morbidité particulièrement élevée, les professionnels de santé en activité ou en formation sont exposés au risque d’épuisement professionnel, étant donné la pénibilité de leur travail que ce soit pour des causes intrinsèques liées à la nature même de l’activité médicale (confrontation avec la souffrance et la mort, prises en charge impliquant l’entrée dans l’intimité des patients, etc.) ou des causes extrinsèques (charge et organisation du travail, etc.). Différents facteurs les rendent vulnérables : demande de performance, image du soignant infaillible, valeurs d’engagement et d’abnégation, injonctions contradictoires, dispositifs de soin complexes et évolutifs, tensions démographiques, insécurité, etc.

Les chirurgiens-dentistes doivent être de plus en plus compétents, de plus en plus formés, faire face à une quantité de tâches cliniques et administratives grandissantes. Pour certains, ils doivent gérer du personnel, des associés, cette gestion comporte des facettes cachées qu’ils découvrent (bien souvent à leurs dépens) : ambiances de travail détériorées voire invivables, prud’hommes ou conflit.

D’autre part, il est important de souligner que les conséquences entraînent des répercussions non seulement humaines, mais aussi sur l’organisation et la qualité des soins. Les soignants nécessitent une prise en charge spécifique via un réseau de soin adapté.

Quels sont les facteurs de risque ?

Le burn-out est une conséquence du stress au travail, plus précisément du stress professionnel chronique. Parmi les principaux facteurs de risque (auxquels se surajoutent les facteurs spécifiques liés à l’épidémie et à la crise sanitaire actuelle) :

  • L’intensité et l’organisation du travail : surcharge de travail, pression temporelle…
  • La charge émotionnelle importante : confrontation à des cas graves, à la souffrance et à la mort, à la détresse des familles…
  •  L’accroissement des procédures à respecter qui limitent l’autonomie, la marge de manœuvre sur son travail.
  • Les difficultés dans les relations, les conflits de valeurs.
  • L’insécurité de l’emploi. La pandémie a pu accroître cette insécurité par la crainte accrue de contaminer ses proches, la stigmatisation familiale et sociale du fait des risques encourus.

Les étapes qui mènent au burn-out :

Il faut d’abord savoir que contrairement à ce que l’on peut parfois entendre, le burn-out touche des personnes très engagées dans le travail.

Il arrive systématiquement en 4 phases :

  1. Engagement : Pendant cette phase, la personne prend plaisir dans son travail, pour lequel elle s’enthousiasme et qui est source de satisfaction. La perception du bien-être et de bonne santé est présente.
  2. Sur engagement : Cette phase constitue le symptôme initial d’épuisement professionnel. La satisfaction et la motivation au travail sont encore très présentes mais petit à petit, l’activité et les pensées professionnelles vont gagner toutes les sphères de l’existence. C’est à ce stade que les proches commencent généralement à exprimer leur inquiétude et leur frustration.
  3. Résistance : La suractivité de la phase de sur-engagement se transforme finalement en acharnement frénétique. La personne nie de plus en plus son surmenage et sa surcharge. Le plaisir fait place à l’anxiété grandissante et à la disparition de la satisfaction au travail. L’estime de soi diminue petit à petit, on commence à douter de soi, de ses capacités. Sans aide extérieure, la personne est à ce stade incapable de s’en sortir seule.
  4. L’effondrement : L’effondrement est la dernière phase de ce long processus. À ce stade, la personne a perdu toute capacité d’initiative qui lui serait favorable. L’estime de soi et tout espoir de parvenir à surmonter les difficultés professionnelles sont anéantis. On assiste à un effondrement total qui affecte toutes les dimensions de la personne : psychique, émotionnelle et physique.

Les principaux facteurs déclencheurs chez les professionnels de santé :

  • Perdre de vue le sens de ce que l’on fait : Pour certains professionnels de santé, il peut y avoir un décalage entre leur vocation initiale de soignant et la réalité de leur métier. La lourdeur administrative, les enjeux de rentabilité et d’efficacité, les difficultés de collaboration ou la complexité juridique peuvent être autant de barrières à l’épanouissement du soignant.
  • Une multiplicité de rôles, lourde à porter : Quand on est dentiste, on peut être autant soignant mais aussi chef d’entreprise… Avoir plusieurs casquettes cela veut dire savoir s’organiser, savoir déléguer et sans formation ou accompagnement sur ces thématiques, on peut vite se sentir débordé.
  • Perdre le contrôle : La délimitation des rôles est parfois peu claire dans le secteur de la santé, étant souvent moins systématique qu’en entreprise. Un manque de clarté sur son périmètre, ses priorités et ses objectifs peut vite mener à une perte de contrôle, grande source de stress pour certains.
  • Un manque de reconnaissance : les signes de reconnaissance sont à la base de toute relation et donc importants dans le cadre professionnel. Ils peuvent être positifs (compliments, félicitations…), négatifs (critiques, retour sur un travail qu’on a mal fait…) ou, plus grave encore, inexistants. Pour les professionnels de santé, tel que les dentistes, ces signes de reconnaissance viennent des patients, des politiques : autant de personnes qui peuvent impacter positivement ou négativement l’estime que la personne a d’elle-même.
  •  Des problèmes d’incivilité : Il y a consensus sur le fait que le nombre d’incidents et de conflits a significativement augmenté dans le secteur médical (des incidents en hausse de 50% en 10 ans). Un environnement hostile est un facteur aggravant de la souffrance au travail et donc déclencheur de burn-out.
  • Chez les chirurgiens-dentistes , les causes spécifiques sont en relation avec le patient, les soins (précision du geste, conséquences des actes, maîtrise des nouvelles techniques…), la gestion financière, la gestion administrative (planning surchargé, urgences…)

Quels signes peuvent alerter ?

Les manifestations de l’épuisement professionnel sont plus ou moins aiguës et peuvent être d’ordre Stress et Burn-out.

  • ÉMOTIONNEL Anxiété, angoisse, tristesse, irritabilité, hypersensibilité, absence d’émotion, sentiment de vide et d’impuissance, colère… au maximum détresse pré suicidaire.
  • COGNITIF Troubles de la mémoire, de l’attention, de la concentration, indécision, difficultés à faire des opérations simples…
  • COMPORTEMENTAL – Repli sur soi, isolement social, difficulté à coopérer, comportement agressif, parfois violent, impulsivité, hostilité à l’égard des collègues… – Besoin de consommer des produits ou des médicaments pour « tenir le coup » (café, tabac, alcool, drogue, somnifères, anxiolytiques…).
  • MOTIVATIONNEL Désengagement progressif, baisse de motivation et du moral, doutes sur ses propres compétences, perte de confiance en soi, sentiment de ne pas être en mesure de faire face à la situation…
  • PHYSIQUE Fatigue généralisée, troubles du sommeil, tensions musculaires, douleurs articulaires, crampes, maux de tête, vertiges, perte d’appétit, troubles gastro-intestinaux…

Comment éviter le burn-out ?

Tout d’abord, s’écouter, écouter ses besoins, ses envies. Les réactions physiques sont souvent un bon indicateur de notre état général. Se demander comment on se sent dans son travail, dans quel état d’esprit on s’y rend, pour repérer tout mal-être dans son activité.

L’entourage (associés, collaborateurs, assistantes, confrères, famille) joue un rôle primordial dans le repérage de ces manifestations de mal-être. Ils peuvent et doivent aider, il faut les écouter.

Ensuite, même si cela va à l’encontre de notre société et de nos rythmes actuels, il faut apprendre à s’arrêter, à faire des pauses (même courtes), à ne pas être en flux continu.

En position de management : mettre en place une organisation qui permette à chacun de respecter son propre rythme, qui assure des temps de relais pour les personnes de première ligne, afin que chacun ait un temps (même court) pour se ressourcer.

Utiliser ses priorités comme boussole. Prendre le temps de se reposer la question : quelles sont mes priorités ? Si besoin, les clarifier avec le responsable, avec les collaborateurs. Et garder toujours ces priorités en ligne de mire quand vous vous sentez débordé :

Suis-je en train de faire quelque chose de prioritaire ?

Est-ce que je suis clair sur ce que j’ai à faire ?

Et quand vous pouvez : déléguez !

Enfin, osez dire et osez demander de l’aide : Vous n’êtes pas seul. Que ce soit dans votre entourage personnel ou professionnel. Quand on est au bord du burn-out on perd pied avec les réalités et souvent on porte seul la charge et le poids de ce qu’on a à faire, sans réaliser que notre entourage ne s’en rend peut-être pas compte et pourrait ou aurait aimé aider.

Qui solliciter pour trouver aide et soutien ?

L’association SPS (Soins aux Professionnels en Santé) : Reconnue d’intérêt général avec 100 % d’appels décrochés, elle propose son dispositif d’aide et d’accompagnement psychologique à tous les professionnels en santé, aux étudiants, à leur famille.

Disponible 24 h/24, 7 j/7 : 0 805 23 23 36.

Il existe aussi une application mobile ASSO SPS, avec 1000 psychologues en soutien, issus du réseau national du risque psychosocial, composé de psychologues, médecins généralistes et psychiatres, en téléconsultation.

La prise en charge du burn-out

La prise en charge vise à traiter le trouble identifié ainsi qu’à agir sur le contexte socioprofessionnel à l’origine du trouble. La prescription d’un arrêt de travail est le plus souvent nécessaire. Sa durée sera adaptée à l’évolution du trouble et du contexte socioprofessionnel. Le médecin traitant coordonne cette prise en charge. Il prescrit si nécessaire un traitement en s’appuyant sur la démarche diagnostique et adresse éventuellement le patient à un psychiatre. L’intervention d’un psychiatre peut être sollicitée notamment pour réaliser un diagnostic psychopathologique ou une adaptation thérapeutique, prendre en charge un trouble sévère et poursuivre un arrêt maladie. La prescription d’un traitement antidépresseur est uniquement recommandée dans le cadre de ses indications (troubles anxieux, troubles dépressifs). Le traitement du trouble peut comporter une prise en charge non médicamenteuse fondée sur des interventions psychothérapeutiques ou psychocorporelles effectuées par un professionnel de santé ou un psychologue formé à ces techniques.

Pour une prise en charge efficace, l’environnement de travail et les causes délétères qu’il engendre devront être déterminées puis travaillées (réorganisation des plannings, travail personnel sur nos croyances, aide comptable pour la gestion financière, formation en communication, formation continue accrue…)